# 3/3 – Ammoniac : Le Palmarès des communes bretonnes


Alors que la Bretagne subit régulièrement des alertes à la pollution de l’air aux particules fines, l’origine principale de cette pollution reste ignorée voire camouflée aux populations touchées.

Zoom sur la Bretagne pour la suite de notre enquête avec le Palmarès des communes les plus émettrices en Bretagne. Découverte inédite d’une pollution débridée.

Volet 3 – Émissions d’ammoniac : le Palmarès des communes bretonnes

Cartographie des communes les plus émettrices

Les communes lauréates du Palmarès « Communes sous ammoniac »

liste des communes dont les émissions d’ammoniac dues aux fermes-usines dépassent 50 t/an

Attention, ces données n’incluent pas les très nombreux élevages émettant moins de 10 t d’ammoniac par an car les exploitants ne sont pas tenus de les déclarer.


Opacité totale sur les autres élevages dont les émissions d’ammoniac sont supposées être inférieures à 10 t/an.

Faute de mesures accessibles sur toutes les sources d’émissions de l’ammoniac agricole, l’Etat et les acteurs institutionnels s’en remettent à des études extrapolations basées sur des modélisations.

Le CITEPA publie de nombreux rapports d’évaluation des tendances pour le compte de l’Etat [extrait du rapport SECTEN 2022]. Ces rapports révèlent que la France fait partie des plus gros émetteurs d’ammoniac en Europe.

source : https://www.citepa.org/wp-content/uploads/Citepa_Rapport-Secten-2022_Rapport-complet_v1.8.pdf – page 188

Un défaut flagrant de volonté politique pour réduire la pollution

dépôt de fientes d’un élevage industriel de volailles avant épandage (bâchage obligatoire pour éviter les émissions atmosphériques) crédit photo: Collectif Bretagne contre les fermes-usines

La France épinglée par l’Europe

Le 14 mai 2020, la Commission européenne a annoncé qu’elle allait engager une procédure d’infraction à l’encontre de la France pour transposition incorrecte de la directive 2016/2284 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques. [article CITEPA]

Des études d’impacts déconnectées des réalités de la pollution de l’air

Les études d’impact environnemental, obligatoires pour toute autorisation d’extension ou de création d’élevage industriel sont censées apporter des données précises sur les impacts du projet.

Voici deux exemples lus dans des études d’impact et qui révèlent l’absence de prise en compte de la pollution par l’ammoniac :

« Les retombées d’azote ammoniacal s’effectuent principalement dans un rayon de 1000 m, elles représentent 20 % des
retombées totales …/… Les retombées ammoniacales ont lieu principalement autour du site d’élevage.
 » [Étude d’impact élevage porcin La ROCHE-PIRIOU Priziac]. »

« – Vérification des performances du système d’épuration d’air par la mesure de l’ammoniac, des odeurs et / ou des poussières dans les conditions d’exploitation normales conformément à un protocole de mesures prescrit par les normes EN ou selon d’autres méthodes garantissant des données d’une qualité scientifique équivalente.
Cette technique n’est pas appliquée. Aucun des bâtiments constituant l’élevage porcin n’est concerné.
– Contrôle du bon fonctionnement du système d’épuration d’air
Non concerné.
 » [Étude d’impact élevage porcin KERFOS Minihy-Tréguier]

Extrait du rapport d’activité 2022 de la Mission Régionale d’Évaluation Environnementale MRAe :

Rapport d’activité MRAe Bretagne 2022 – extrait page 18

Des soutiens financiers orientés vers des systèmes polluants et un abandon des filières tournées vers l’agro-écologie

Les montants des aides versées sont éloquents. Face à la crise de trésorerie des porcheries industrielles en 2021, l’État a accordé une aide de 270 millions pour 5 500 éleveurs, soit 49 000 € par élevage.

En revanche, la filière bio ne se voit octroyer qu’une aide de 10 millions pour l’ensemble des 60 000 fermes, soit 166 € par ferme.

Des réponses de l’État inadaptées à la nécessité d’agir

Les initiatives de l’État pour réduire les émissions d’ammoniac se limitent à quelques études. Celles-ci sont menées avec le concours d’acteurs sous l’influence directe de l’élevage industriel, sans les voix des contre-pouvoirs de la société civile. Exemple : Programme ABAA.


Il ressort de ces infographies et données :

1Les nuages invisibles au-dessus de ces communes constituent une menace pour la santé. Les retombées qui en découlent contribuent à la mortalité due à la pollution de l’air.

2 En renonçant à réguler le nombre d’élevages autorisés et à fixer des plafonds d’émission d’ammoniac, l’État ne remplit pas son rôle de garant de la protection des populations face à la pollution de l’air en France. Les préfectures ne respectent pas le code de l’environnement qui exige la prise en compte des effets cumulés (article 122-5 du Code de l’Environnement -« e » du 5° du paragraphe II). L’État fait des choix qui mettent en jeu la santé des populations et la qualité de l’environnement.

3 – Faute de mesures indépendantes et fiables, l’ensemble des émissions d’ammoniac reste mal connu et largement sous-évalué. Dans ce contexte, comment la France peut-elle honorer les objectifs de baisse de ses émissions d’ammoniac de 13% entre 2005 et 2030 ? A noter par ailleurs que ces objectifs sont parmi les moins ambitieux d’Europe [Directive 2016/2284 tableau B page 20].


Solutions

Nous, citoyen.ne.s, exigeons que l’État prenne ses responsabilités :

Particules fines :
– mettre en place des stations mesures rurales : 3 par département. Il en existe une seule pour la Bretagne aujourd’hui à Merléac.
– publier le nombre de jours en dépassement des émissions de particules fines et des moyennes annuelles avec la valeur « Objectif de qualité : 10 µg/ m ³ en moyenne annuelle civile » (Article R221-1 du Code de l’environnement).

Émissions d’ammoniac :
– une réglementation des émissions d’ammoniac par établissement (5t/an max pour les élevages) avec déclaration annuelle dès 1t/an et des contrôles réels et réguliers des ICPE,
– des mesures en continu des niveaux de pollutions de l’air par l’ammoniac,
– une transparence de l’information sur les sources et émissions d’ammoniac et sur les mesures des niveaux de pollution de l’air.

Politique d’orientation agricole :
– un moratoire immédiat et strict sur les autorisations administratives d’extensions ou de créations d’élevages industriels ICPE,
– un objectif de réduction de 50% sur 5 ans du nombre des élevages industriels (premier palier),
– un programme d’accompagnement à la reconversion pour les exploitants d’élevages industriels,
– un plan de développement et de soutien des filières d’élevages paysans et des solutions production-consommations territorialisées,
– une fiscalité pénalisante pour les élevages industriels nationaux et les produits et viandes importés d’élevages industriels.


Investigation, analyse et infographie : Collectif Bretagne contre les fermes-usines


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Références et liens

Georisques : https://www.georisques.gouv.fr/donnees/bases-de-donnees/installations-industrielles

Georisques : https://www.georisques.gouv.fr/installations-industrielles-rejetant-des-polluants

Méthodologie d’élaboration des classifications communales et départementales à partir des données publiques

Note technique : les chiffres présentés dans les infographies et qui concernent les émissions d’ammoniac sont issus des dernières données publiées par les services de l’Etat et correspondent aux déclarations pour chaque élevage pour l’année 2021. Ils sont exprimés annuellement et sont susceptibles d’évolution au cours du temps en fonction des pratiques mises en place par les exploitants des élevages. Ces chiffres ne représentent qu’une fraction de l’ensemble des émissions d’ammoniac émanant de pratiques agricoles.